_Dassault_Aviation_-_Alex_Paringaux

Analyse - Le 25 janvier dernier, Saab livrait officiellement le fuselage du démonstrateur UCAV nEUrOn au maitre d’œuvre Dassault Aviation.  Cet événement marque le début de la montée en puissance de l’assemblage du futur drone furtif. 

Celui-ci se déroulera dans les ateliers d’Istres jusqu'au dernier trimestre 2011, avec pour objectif un premier vol à  la mi- 2012. Le projet de  405 M€ rassemble des industriels de 6 pays européens. Pendant ce temps, BAe sytems avec son Taranis en Grande Bretagne poursuit toujours son chemin seul, malgré le rapprochement de Paris et Londres dans le secteur de la défense.

 

 

 

 

Fuselage_nEUROn_SAABL’avancement du programme

Le projet mené par la DGA, rappelons le, rassemble l’italien  Alenia aéronautica, le Grec HAI,  l’espagnol EADS Casa, le Suisse Ruag, et Saab autour de Dassault Aviation. Après une constatation du glissement du projet en 2010, la DGA a révisé le calendrier, le plan demande à tous les partenaires de livrer à date prévue toutes les pièces, quelque soit leur niveau d’avancement. Le travail sera terminé à Istres au même moment que le début de l’assemblage. Dernièrement, le fuselage arrière a été livré en janvier par HAI, puis ce sera autour de Ruag pour le pantographe fin février, EADS Casa livrera les ailes début mars, les trappes de soute d’Alenia pour fin mars, puis la tuyère provenant de HAI et des trappes de train de Saab. Dassault, qui se charge de la maîtrise d’œuvre confectionnera les éléments de furtivité, notamment bords d’attaques et de fuites.

Le drone motorisé par un Adour MK951 de Rolls Turbomeca, débuterait ses essais en vol en espace ségrégé. Une grosse partie du programme prévoit  la mise à l’épreuve de la furtivité de l’appareil sur trois zones différentes. En Suède le drone fera face au radar Giraffe En France, le RBE2 du rafale et les AWACS seront mis à contribution. Ces essais se termineront en Sardaigne, où les tests valideront le capteur infrarouge de silex Galileo, qui aura pour rôle  de repérer une cible et après validation d’un opérateur de l’engager grâce aux soutes à bombe pouvant contenir chacune une munition de 250kg.

Le Taranis de BAe systems, démonstrateur d’un drone furtif pouvant exercer une frappe aérienne sur un autre continent  devrait débuter ses essais en vol en 2011 probablement en Australie sur le site  de Woomera. Le système d’outre manche ne fera cependant que simuler le largage d'armement, aucun financement n'ayant été prévu pour des essais réels.

Pas de rapprochement nEUROn-Taranis en vue taranis_2

Le traité militaire franco-britannique de 2010, fait de la coopération  dans le secteur des drones un de ses principaux axes. On parle beaucoup du développement d’un  drone de surveillance à capacité offensive en commun. Malgré cela et bien que les besoins opérationnels en terme d’UCAV semblent sensiblement concordants, aucun rapprochement entre le système britannique et celui de la DGA n’est pour l’instant envisagé. Il s’agit bien sûr de ne pas répéter l’erreur du Rafale et de l’Eurofighter qui aujourd’hui se dispute le marché et de rattraper le retard sur les systèmes américains.

En cas de coopération avec le Royaume uni, « rien n’empêcherait d’y embarquer l’équipe de Dassault et ses partenaires », mais BAe systems  étant très implanté  aux Etats unis, on doute que l’entreprise se tourne vers l’Europe après bien des années de coopération sur les drones armés américains.

 

 

sommet-franco-britanniqueRapprochement Franco-britannique mais éloignement de Berlin

Dans le cadre de la coopération franco-britannique, le calendrier prévoit un drone MALE démonstrateur en 2013-2018, les industriels auraient pris les devants, Bae sytems et dassault ont conclu un rapprochement afin de répondre à l’appel d’offre. Ceci une nouvelle fois n’arrange pas les affaires d’EADS et de son Talarion, amputé de financements publics. Le Consortium mis à mal par l’Allemagne condamnée par la rigueur budgétaire, vient d’annoncer qu’elle revendra 13 de ses A400M à un client tiers sur la commande des 53 transporteurs prévue ce qui équivaut évidement à 13 ventes à l’export de moins pour  Airbus Military.  La Bundeswehr renonce aussi à l’acquisition de la version RESCO du NH90, et Eurcopter s’attend  à de nouvelles annulations des prochaines commandes de Tigre. Cette série d’annulation s’explique par la réduction des effectifs des forces armées allemandes (185 000 contre 250 000 hommes auparavant),  « une armée plus petite a besoin de moins de matériels » d’après le discours des députés libéraux allemands.  Berlin ne paraît plus aujourd’hui comme un partenaire industriel fiable, délaissant la coopération franco-allemande pour une coopération « germano-allemande » comme le montre le 3305890751_328e2c2a9f_bprogramme de drone Rheinmetall et de missile Diehl. On comprend donc tout à fait  la nécessité de trouver un nouveau partenaire pour Paris qui aura donc misé sur Londres.

Avec le rapprochement des deux cotées de la manche,  on peut néanmoins s’attendre à de beaux succès, notamment avec  le missilier MBDA qui devrait établir les  fondations d’un maître d’œuvre européen du missile. On constate depuis quelques années le choix britannique  de délaisser les missiles américains, pour ceux de l’industriel européen. Le programme Meteor mené par le DoD britannique, l’Aster 30 équipant les frégates de classe T-45 et Horizon (système PAAMS), les missiles de croisière SCALP/STORM SHADOW, ainsi que le programme de missile air surface léger en sont les derniers exemples.

Si on peut s’attrister sur le fait que le Taranis et  le nEUROn font encore bande à part, rappelons que ce ne sont que des démonstrateurs, le nEUROn a déjà le mérite de réunir 6 pays, bien qu’il manque les 2 grandes nations européennes que sont l’Allemagne et le Royaume-Uni.  En 2014 le programme de la DGA arrivera à sa fin, et il sera temps pour chacun d’en faire le bilan. Espèrons que cela sera suivra parl e lancement d’un programme d’équipement d’UCAV pour les années 2020-2025, où là tous les feux seront au vert pour y rassembler les Britanniques.  Si EADS, avec notamment Airbus est un exemple parfait d’Europe unie, bien que motivée aujourd’hui par les restrictions budgétaires, le chemin vers  une Europe de la défense coordonnée, forte et puissante est encore long pour les Etats.

Arnaud Gonnard