Aeroplans - B474-8 FSélection - Les derniers télégrammes diplomatiques américains dévoilés par WikiLeaks et le « New York Times » illustrent les efforts des diplomates américains en faveur de leur avionneur.

La dernière livraison de télégrammes diplomatiques américains fournis par WikiLeaks au « New York Times » apporte un éclairage inédit sur les efforts du gouvernement américain pour soutenir les ventes de Boeing à l'étranger. Consultables depuis hier sur le site du quotidien américain, ces courriers concernent des campagnes menées entre 2004 et début 2010, dans des pays aussi divers que l'Arabie saoudite, la Turquie, Bahreïn, la Syrie et la Jordanie, pour lesquels l'intervention des diplomates a permis de faire pencher la balance en faveur de Boeing. S'ils ne relatent aucun fait répréhensible, ils illustrent l'âpreté de la compétition entre Américains et Européens.

 

 

 

Un télégramme de l'ambassade américaine à Bahreïn raconte notamment les efforts déployés en 2007 pour emporter une commande ferme de Gulf Air pour 16 Boeing 787 et 8 options, d'une valeur totale de 6 milliards de dollars. En décembre 2007, l'affaire semble pourtant gagnée pour Airbus. Gulf Air a même annoncé sa défaite à Boeing, dont l'offre est supérieure de « 400 millions de dollars » à celle d'Airbus. Mais l'ambassadeur américain à Manama monte lui-même au créneau et parvient à convaincre l'émir de Bahreïn, principal actionnaire de Gulf Air, de choisir Boeing, en contrepartie d'un dernier rabais de 5 %. Et ce, en dépit d'une ultime tentative de Nicolas Sarkozy, qui propose de se rendre en personne à Bahreïn pour conclure la commande d'Airbus. La visite présidentielle sera finalement annulée, faute de contrat, au grand dam des autorités de Bahreïn et pour la plus grande satisfaction des Américains. Autre exemple d'intervention : celle de George W. Bush auprès du roi d'Arabie saoudite, pour une commande de 12 Boeing 777-300 ER d'une valeur de 3,3 milliards de dollars. Le roi Abdullah, de retour d'une visite aux Etats-Unis, ne discute pas le prix, mais veut que son avion personnel, un Boeing 747, soit doté des mêmes équipements high-tech qu'Air Force One, l'avion présidentiel américain. Ce sera apparemment chose faite.

Plus exotique encore, la demande du président turc, qui aurait voulu, entre autres choses, une place pour un astronaute turc dans l'un des derniers vols de la navette spatiale, en contrepartie d'une commande de 20 appareils par Turkish Airlines. Cette compagnie se contentera finalement d'une ristourne et d'une aide de l'aviation civile américaine à la modernisation de l'espace aérien turc.

Crainte de scandales

En Tanzanie, les diplomates américains doivent même faire face à une offre d'Airbus soutenue par... Pékin ! Les Chinois conditionnent en effet l'octroi d'une aide à la Tanzanie à une commande d'Airbus A320, dont ils viennent d'obtenir une chaîne d'assemblage à Tianjin. Cependant, les diplomates américains et leurs compatriotes de Boeing n'iront pas jusqu'à accepter de rémunérer un « intermédiaire » pour faciliter les choses.

Même scénario en Turquie. Apparemment, la crainte des scandales de corruption, qui avaient coûté son poste à un ancien PDG de Boeing dans les années 1990, a laissé des traces côté américain.

Par BRUNO TRÉVIDIC, Les Echos

http://www.lesechos.fr/entreprises-secteurs/air-defense/actu/0201044998419.htm