Aeroplans - Lanceur Safir sur son pas de tirEn Bref - Deux ans après le lancement d’Omid (Espoir) en février 2009, c’est au tour de Rasad-1 (Observation-1) de rejoindre la cohorte de satellites en orbite au dessus de nos têtes.

Le lancement semble avoir eu lieu hier dans la journée, bien que la nouvelle n’ait été diffusée que plusieurs heures plus tard. Contrairement à Omid qui était un satellite de télécommunications, du moins de télémétrie, Rasad-1 est un satellite d’observation de la Terre et de météorologie. Cependant, le faible poids du satellite, 15,3kg, ne lui permet pas d’emporter d’équipement de haute résolution et lui confère une durée de vie limitée à deux mois. Au mieux, la résolution de la charge utile serait de la centaine de mètres.

 

 

Rasad-1 a été construit par l’université Malek Ashtar à Téhéran, qui serait dépendante du corps des Gardiens de la Révolution. C’est un lanceur Safir qui a placé le satellite sur orbite. Il n’est cependant pas clair si ce fut le même qu’utilisé pour Omid ou une évolution. Il est en effet étonnant qu’hier, la performance du lanceur semble avoir été moindre que celle d’il y a deux ans. Alors que le premier satellite iranien pesait 27kg et fut placé sur une orbite elliptique de 383,8 à 252,7 kilomètres, Rasad-1 à un poids près de deux fois moindre pour une orbite à 260km environ. Officiellement, le lanceur d’hier devait être un Safir-1B, une évolution du Safir-2 utilisé pour Omid. La poussée du moteur aurait été augmentée, passant de 32 à 37 tonnes, permettant de placer une charge de 50kg sur une orbite elliptique de 330 à 450km. Si c’est donc bien un Safir-1B qui était sur le pas de tir hier, soit le lanceur fut utilisé en dessous de ses capacités, soit le lancement fut un échec partiel. Il est néanmoins possible que la première option soit la bonne puisque plus l’orbite d’un satellite d’observation est basse, plus sa résolution est grande. De plus, le lanceur Safir-1B semble avoir été spécifiquement conçu pour satelliser la charge Fajr (Aube), premier satellite iranien ayant la capacité de circulariser son orbite à 450km.

Le tir d'hier aurait donc servi de test avant le véritablement objectif visé au travers de ce lanceur. Fajr sera surement le prochain satellite à être lancé, possiblement cette année. Si le lancement est un succès, ce sera alors une nouvelle étape de franchie pour les Iraniens dans leur course à la maîtrise des technologies spatiales.

C’est justement cette course à l'Espace qui inquiète les pays occidentaux. Ceux-ci craignent qu’un agenda militaire se cache sous le programme spatial iranien. Il faut dire que le lanceur Safir n’est autre qu’une évolution du missile balistique Shahab-3 qui équipe le corps des Gardiens de la Révolution. Ce missile est symboliquement significatif puisqu’il fut le premier dans l’arsenal iranien à avoir une portée suffisante pour atteindre Israël, voir l’Europe de l’Est. Sur la vidéo du lancement d’hier on peut d’ailleurs remarquer qu’il se fait à partir d’un camion TEL (Transporter Erector Launcher) utilisé habituellement pour les tirs de missiles balistiques. Un programme spatial peut offrir une couverture légitime et légale aux études de technologies nécessaires à la conception de missiles balistiques intercontinentaux (ICBM). Ceux-ci nécessitent en effet la maîtrise de plusieurs techniques telles que la séparation des différents étages ou la manœuvre de charges dans l'espace exo-atmosphérique. Hors, si le premier objectif (la séparation des étages) semble être atteint depuis le lancement d’Omid, le second pourrait l’être partiellement en cas de succès du lancement de Fajr. Restera ensuite à maîtriser la rentrée contrôlée d’un corps dans l’atmosphère. Et bien évidemment les scientifiques de l’agence spatiale iranienne (ISA) ont déjà prévu une telle démonstration puisqu’ils comptent envoyer une capsule « hébergeant » un singe dans les prochaines années. On peut signaler qu’une tentative a déjà eu lieu en 2010, un lanceur avait déjà envoyé dans l’Espace deux tortues, un rat et des vers de terre, mais rien n’avait filtré quant à leur sort. Il est donc probable que la charge n’ait pas été récupérée.

Ainsi, l’Iran poursuit doucement son chemin vers les étoiles. Officiellement, les Iraniens comptent envoyer un homme dans l’Espace en 2020, puis sur la Lune en 2025. Si ces objectifs sont quasiment inatteignables, d’autres pourraient être plus réalistes. On peut penser à la mise en orbite de satellites géostationnaires ou de satellites d’observation ayant un réel intérêt stratégique. Il semblerait néanmoins que les retards de plusieurs mois voir années du lancement de Rasad-1  démontrent que les Iraniens rencontrent des problèmes dans leur programme spatial. Certains y voient la preuve de l’efficacité des sanctions auxquelles fait face Téhéran du fait de la poursuite de ses programmes nucléaire et balistique…