Aeroplans - Rafale et Mirage 2000D en route pour la Libye - Crédit Armée de l'airAnalyse - Après avoir été décrit  comme inefficace à une certaine époque, il semblerait que le lobbying français en Inde porte désormais ses fruits puisque deux très bonnes nouvelles pour l’industrie aéronautique française ont été annoncées à quelques semaines d’intervalles.

La première fait état de la présélection de l’avion phare de Dassault, le Rafale, pour le méga contrat MMRCA. La seconde concerne quant à elle la modernisation de la flotte des Mirage 2000H de New Dehli, qui servira entre autres à faire patienter les forces aérienne du pays en attendant le vainqueur de la compétition MMRCA.

 

Le Rafale et l’Eurofighter « short-listés »

C’est fin avril que l’information a filtré dans la presse spécialisée. L’Inde aurait désormais restreint le nombre de candidats potentiels à ce que certains décrivent comme le contrat du siècle. En effet, celui-ci consiste en la livraison de 126 avions de combats de quatrième génération, le tout pour un montant de plus de 10 milliards de dollars. Ces avions remplaceront notamment la flotte des antiques Mig-21 dont la valeur militaire devient plus que douteuse.

Bien que l’information n’ait pas fait l’objet d’annonce officielle de la part du Ministère de la Défense indiens, un haut responsable a « confirmé que l’Eurofighter et le Rafale sont sélectionnés et que les quatre autres candidats sont rejetés ». Parmi ces derniers figurent le Gripen de Saab, le Mig-35, le F-18 E/F de Boeing ainsi qu’une variante du F-16 de Lockheed Martin proche de celle des Block 60 émiratis. Si le gouvernement indien n’a fait aucune déclaration, l’ambassade américaine à New Dehli a quant à elle confirmé que les appareils américains ont bien été exclus de la compétition, provoquant une « grande déception » à Washington, selon l’ambassadeur Timothy Roemer. Saab a également confirmé son élimination le lendemain.

Un processus de sélection « juste et transparent »

 Ce sera donc une finale 100% européenne à laquelle nous assisterons durant les prochains mois, pour une signature de contrat espérée en mars 2012. Contrairement à la plupart des contrats précédents dans le monde, il semblerait que la sélection se soit faite sur des critères purement techniques et non politiques. Ainsi, les militaires indiens auraient établi une liste de 643 critères afin de déterminer lequel des appareils était le plus performant. Le gouvernement indien aurait assuré à l’ambassadeur américain que le processus de sélection a été et sera juste et transparent. La sélection du Rafale et de l’Eurofighter est dans ce cas somme toute logique puisque le Gripen est plus petit qu’eux, et possède donc une capacité d’emport en carburant et armements moindre, tandis que les trois autres concurrents ne sont que des versions modernisées d’appareils datant de la fin des années 70.

Outre le fait que les deux concurrents européens soient désormais en bonne position pour remporter ce contrat, cette présélection apparemment purement technique pourrait également servir à des Etats n’ayant pas les moyens de mener une telle étude comparative. Ceux-ci attendraient donc de savoir qui gagnera la compétition pour ensuite faire leur choix. Le gagnant se verrait ainsi gratifier de plusieurs contrats. D’où l’extrême importance qu’accordent les constructeurs à cette compétition.

Et pendant ce temps...

En parallèle à ce méga-contrat, les industriels français étaient également en compétition pour la modernisation de la flotte de Mirage 2000H indiens. Cela faisait quatre ans que Dassault, associé à Thales et MBDA, affrontait le groupe israélien Elbit Systems Ltd pour ce contrat de 2,1 milliards de dollars. Celui-ci porte sur la modernisation de 51 appareils et vise à les modifier en profondeur en les faisant passer au standard Mirage 2000-5 Mk2. Cela consiste notamment à remplacer le radar actuel par le RDY-3 multi-modes / multi-cibles de Thales, à installer un nouveau cockpit tout écran, ainsi qu’à moderniser le système de combat et de contre-mesures électroniques. Les appareils indiens seront également dotés d’une liaison de données ainsi que d’un viseur de casque. Les services du Premier Ministre français chargés de l’exportation des armements ont par ailleurs donné leur accord pour la fourniture de missiles air-air moyenne portée MICA de MBDA ainsi que d'autres munitions guidées.

Après la signature du contrat d’ici à trois mois, les intégrateurs principaux que sont Thales et Dassault seront chargés de moderniser les quatre premiers appareils en France, puis les 47 restants le seront par l’industriel indien HAL, les derniers appareils devant être livrés d’ici à 5 ans.

Un choix de bonne augure ?

Là encore, on peut se réjouir que l’Inde ait fait le choix de la solution la plus technologiquement avancée et non de la moins chère. Hors, certains voient en ce premier contrat une préparation à la victoire du Rafale face à l’Eurofighter. En effet, de nombreux systèmes sont à la fois présents sur le Mirage 2000-5 Mk2 et sur le dernier né de Dassault, notamment en ce qui concernent l’armement. Choisir le Rafale serait donc gage d’économies en termes de maintenance. Hors le Maintient en Condition Opérationnel (MCO) est justement pris en compte dans la compétition MMRCA. Et ce sans tenir compte du fait que le Rafale a presque toujours terrassé son opposant lors de combats simulés.

De plus, le conflit en Libye a une fois de plus démontré tout le potentiel de l’appareil français, qui a été apte à mener quasiment l’ensemble des missions possibles pour un avion de combat, que ce soit en supériorité aérienne, en bombardement stratégique, en reconnaissance ou en soutien aérien, et même en tant ravitailleur en vol ! Seules les frappes anti-navires et nucléaires manquent à l’appel (fort heureusement). Pendant ce temps, l’Eurofighter peine à se départir de son rôle de pur chasseur issu de la Guerre Froide, bien qu’il ait enfin pu mener des missions d’attaques au sol plusieurs semaines après le début du conflit.

Ainsi, si le processus de sélection indien se poursuit sur des critères purement techniques, on ne peut qu'être confiants quant à l’issue de la compétition. Mais les nombreux contrats prétendument gagnés d’avance par le Rafale pour être finalement ravis par d’autres doivent cependant nous inciter à la plus grande prudence. Nous ne pourrons nous réjouir qu’à la signature définitive du contrat, voir qu’à la livraison des premiers appareils.