Aeroplans - MRJOn pourrait croire à une mode, chaque grand pays qui possède ou qui souhaite acquérir une industrie aéronautique digne de ce nom se lance aujourd'hui dans la réalisation puis la commercialisation de son jet régional. Ces appareils d'une centaine de sièges ont le vent en poupe car après les Russes et leur SuperJet, les Chinois et l'ARJ-21, les concurrents sont de plus en plus nombreux à vouloir détrôner les leaders du marché que sont Embraer et Bombardier. Mitsubishi ambitionne désormais de faire partie de ce cercle et ce, quitte à déplaire à son partenaire d'antan, le Canadien Bombardier.

La production des premiers Mitsubishi Regional Jet (MRJ) est imminente, d'ici quelques semaines encore, le Japon pourra se venter d'avoir su bâtir une industrie aéronautique qui lui est propre et dont l'emblème sera ce futur appareil. Deux modèles devraient être développés, le MRJ 70 et le MRJ 90 qui, comme leurs noms l'indiquent, pourront respectivement transporter soixante-dix et quatre-vingt-dix passagers.

Aeroplans - MRJIls auront chacun deux versions à rayon d'action allongé, la version ER (Extended Range) et la version LR (Longer Range). Ainsi, un MRJ 70 en version standard pourra voyager sur 1 690km tandis qu'un MRJ 70LR pourra parcourir 3 910km. Cependant, la naissance de cet appareil est assez controversée dans le monde occidental. Si les acteurs dominants n'aiment évidemment pas la concurrence, Bombardier affirme que Mitsubishi ne joue pas franc jeu. Ancien fournisseur de l'avionneur canadien, les Japonais ne cachent pas avoir beaucoup appris à leur contact.


Si les Occidentaux pratiquent volontiers la langue de bois quand il s'agit de la naissance de l'ARJ-21, le futur avion régional chinois, il en va tout autrement des Japonais. Depuis des années, l'industrie de ce pays participe à la construction des avions du monde entier en tant que fournisseur performant. Contrairement à leurs voisins chinois, les Japonais apportent une réelle valeur ajoutée aux appareils ainsi construits et c'est bien logique. Le Japon a toujours basé sa stratégie de développement économique sur la supériorité technologique.


Boeing ne s'y est d'ailleurs pas trompé, alors que la concurrence commence à être inquiète, la firme de Seattle affirme son soutient à Mitsubishi en proposant son aide et son savoir faire pour la maintenance des appareils ainsi que pour la vente de ces derniers. Un signe fort de la part des Américains alors qu'ils ne sont pas directement menacés puisque Boeing ne compte a priori pas se lancer dans la fabrication de petits jets régionaux.


Reste que l'appareil sera évidement placé à l'avant-garde de la technologie. Utilisation maximum de matériaux composites, confort en cabine et réacteurs de nouvelle génération Geared Turbofan de Pratt & Whitney (GTF) qu'ils seront les premiers à utiliser, le Japon fait valoir ses compétences issues d'années de collaboration avec les autres avionneurs, et aussi celles de la JAXA, l'agence spatiale japonaise.


Fidèles à leur tradition d'excellence, les ingénieurs japonais veulent que leur avion soit littéralement à la pointe de la technologie. La concurrence étant de taille, les appareils japonais ne devront pas seulement être fiables et confortables, ils devront apporter un réel plus dans leurs conditions d'exploitation. Le choix des nouveaux moteurs GTF de Pratt & Whitney ou PW8000 découle de ce constat. Le moteur n'ayant jamais été testé à si grande échelle il est pourtant très prometteur selon son constructeur. En effet, il permettrait de réduire de 12% la consommation de l'appareil en carburant. Plus qu'une meilleure emprunte écologique chère aux japonais, le bénéfice d'exploitation pour les clients potentiels est énorme. Ajouté à la structure innovante de l'avion, les coûts d'exploitation seraient réduits de 20% par rapport à la concurrence. Si Soukhoï et son SuperJet affiche des économies de 12% sur ce même terrain, portant déjà un coup dur aux autres acteurs, l'avance des japonais serait considérable même si le MRJ est un peu plus cher à l'achat qu'un SuperJet puisque le prix catalogue est pour l'instant de 4 milliards de yens soit 30 millions d'euros.

Aeroplans - GTFAvec de tels atouts, le Japon fait renaître une industrie aéronautique qui ne participait plus qu'à des programmes étrangers et notamment ceux de Boeing. Cependant, le MRJ ne sera pas le premier appareil régional à avoir été conçu, développé et produit sur l'archipel. Le turbopropulseur YS11, conçu par la Nihon Aircraft Manufacturing Corporation, dont faisait partie MHI, l'avait précédé dans les années 60 et avait remporté un certain succès au Japon et en Amérique du Nord. Entré en service en 1965, sa production avait été suspendue en 1973. Mais le dernier appareil n'a quitté la vie opérationnelle qu'en septembre 2006.


Le MRJ dont le premier vol commercial devrait avoir lieu en 2013 (tout comme le CSeries de Bombardier) devrait comme son aïeul remporter un franc succès. Reste que la concurrence est de plus en plus rude, dans un marché qui devra encore se remettre de la crise actuelle dans les années à venir.