AeroplansAnalyse - Les récents incendies qui ont ravagés l'été dernier la Russie ont bien mis en évidence l'importance de détenir et entretenir des moyens adaptés à une lutte efficace contre les incendies.

Dans le cas russe, le manque d'organisation et de moyens a souvent été mis en avant pour incriminer les autorités. La relative incapacité du gouvernement de déployer des dispositifs opérationnels efficients est notamment en partie explicable par des décisions prises depuis la chute de l'URSS et qui ont consisté (ou ont eu pour conséquence) de mettre à bas des organisations administratives, bureaucratiques, territoriales de l'ère soviétique qui avaient le mérite d'offrir un maillage fin et de permettre un bon niveau de contrôles des espaces forestiers.

 

 

Provoqués par la chaleur anormale et une sécheresse sans précédent, les incendies naturels ont ravagé 1,1 million d'hectares de forêts dans plus de 20 régions russes depuis début juillet, faisant 53 morts, environ 800 blessés et plus de 3.500 sans-abri. Certes, les incendies de forêt sont beaucoup moins meurtriers que la plupart des autres catastrophes naturelles, mais ils restent dangereux pour les pompiers et dans une moindre mesure pour la population. En dehors de cet aspect, les incendies de forêt ont un réel impact économique, matériel et environnemental. En détruisant des habitations, des zones d'activités économiques et industrielles, ainsi que des réseaux de communication, ils peuvent se transformer en fléaux économiques (coûts de reconstruction et pertes induites par les ruptures d'exploitation). Les feux sont aussi une source de pollution et de destruction écologique grave. Une pollution de l'air, tout d'abord, avec l'émission d'hydrocarbures, de goudrons et de suies cancérigènes, l'augmentation des gaz carboniques et les métaux lourds libérés par la combustion des arbres qui les ont accumulés. La catastrophe russe a même fait craindre une pollution radioactive lorsque les flammes se sont approchées du site nucléaire de Sarov, près de Njni-Novgorod, ou que l'on a craint un départ de feu près des régions polluées par le nuage de Tchernobyl. Enfin ils peuvent affecter durablement la résilience écologique de l'écosystème c'est-à-dire qu'ils peuvent empêcher qu'elle retrouve un fonctionnement et un développement normal après la perturbation.

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Afin de lutter plus efficacement contre ces menaces, de nombreux pays, essentiellement ceux du sud de l'Europe (Italie, Grèce, Espagne, Portugal) ont mis en place des procédures de prévention et de réaction basées sur la coopération. La France, l'Espagne, l'Autriche, l'Italie, Chypre et la Turquie ont par exemple répondu à l'appel de Grèce, en 2007, en envoyant des renforts humains et aériens, à titre bilatéral ou dans le cadre du Mécanisme communautaire de protection civile. Si c'est là un bel exemple de solidarité européenne, il s'avère qu'il reste insuffisant et chaque année des pays doivent faire appel à des sociétés privées pour leur louer des appareils durant la saison estivale.

La réserve tactique européenne : signe de bonne volonté politique européenne

L'Europe, dont 35% environ du territoire est recouvert de forêt, s'est investie depuis 2000 dans la lutte contre les incendies. C'est à cette date que la Commission instaure le système EFFIS (European Forest Fire Information System), qui permet de fournir une approche paneuropéenne de l'évaluation quotidienne des risques d'incendies de forêt à long terme et à court terme, et d'évaluer les dégâts provoqués par les incendies de forêt. En janvier 2002, elle établit un Centre de réaction, fonctionnant 24 heures sur 24, qui coordonne l'assistance offerte par les pays participants en cas de catastrophe naturelle ou causée par l'homme à l'intérieur et à l'extérieur de l'UE.

Aeroplans - Canadair CL 215L'Europe intervient aujourd'hui pour proposer logistique et matériel aux pays membres qui en ont besoin. Mis en place en juillet 2008, sur un budget européen doté de 3,5 millions, la réserve tactique européenne d'avions de lutte contre les incendies est le fruit d'une coopération entre les Vingt-sept et l'Islande, le Liechtenstein et la Norvège dans le domaine de la sécurité civile. Deux Canadair CL 215 sont mis à disposition pour assister les États membres dans les cas où les autres États membres ne sont pas en mesure de leur prêter main-forte. Ces avions peuvent être utilisés à raison de 150 heures de vol entre le 1 er juillet et le 30 septembre. Ce projet-pilote est géré par la France et les deux avions sont basés en Corse. " C'est un excellent exemple de la valeur ajoutée européenne " a expliqué le commissaire européen à l'Environnement, Stavros Dimas : " La solidarité entre les États membres reste au cœur de notre coopération en matière de catastrophes, mais nous devons nous assurer que nous avons les bons outils à notre disposition pour réagir à tout type de situation d'urgence." Cette force doit permettre d'éviter le Aeroplans - Dash 8 FRrenouvellement d'un cas comme celui de la Bulgarie, qui avait été contrainte, en 2007, de demander l'aide de la Russie, car aucun Etat européen n'avait pu lui venir en aide.

La lutte contre les feux de forêt, (triste) opportunité de structurer une action commune.

La démarche européenne l'a montré, la lutte contre les feux de forêt est l'occasion de structurer une action commune efficace, c'est probablement le seul effet positif de ces catastrophes. L'Union pour la Méditerranée en a ainsi fait une de ses propositions phares en matière de coopération dans le secteur de la protection civile. Le risque de feu existe en effet, a fortiori dans les pays chauds qui bordent le bassin méditerranéen, où évoluent des forêts de Cèdre (Liban..) de sapins (Maroc…) ou autres et où les ressources en eau font défaut. Ces propositions prennent aussi racine dans la question des coûts engendrés par la lutte contre les flammes.

Les personnels déployés et plus encore, les matériels, ont un coût élevé qui peut même s'avérer rédhibitoire pour une lutte efficace. Pour ne citer que l'exemple de la France, qui est assez bien équipée, elle entretient à Marignane 26 appareils de lutte contre le feu : 12 Canadair, 9 Tracker, 2 Dash 8, 3 Beechcraft 200, plus un Beechcraft 1900 du Ministère de l'Intérieur vient renforcer l'escadrille durant la saison estivale. Ces avions ne sont pas tous de première jeunesse et de confession de leurs pilotes, ils mériteraient d'être remplacés… C'est un peu cher d'autant que la France ne produit pas ces appareils, ni l'Europe d'ailleurs. Les constructeurs russes, canadiens ou américains tiennent le haut du pavé avec leurs avions. Eurocopter produit tout de même quelques hélicoptères bombardiers d'eau mais d'une coopération à l'autre, il ne serait pas absurde d'envisager de lancer une coopération industrielle dans ce secteur dans la mesure où bien des appareils européens auraient besoin d'être remplacés. Toutefois, la demande pour ce genre d'appareils est très faible et la concurrence bien installée ; une coopération dans le domaine de la sécurité civile efficace est déjà un pas important !

Six axes de coopération prioritaires ont d'ores et déjà été fixés: la dépollution de la mer Méditerranée, la création d'autoroutes de la mer, le lancement d'initiatives de protection civile destinées à lutter contre les catastrophes d'origine naturelle et humaine, l'élaboration d'un plan solaire méditerranéen, un soutien aux PME et micro-entreprises et le développement d'universités

On est en tout cas face à un problème qui concerne un ensemble de pays proches (sud et nord) mais qui a l'avantage d'être relativement déchargé d'une forte connotation politique, géopolitique, économique et qui donc devrait être de nature à déchainer les volontés de parvenir à de vrais partenariats industriels autour de filières aéronautique spécialisées pour lesquels il est bien évident, et naturel, que nos grands opérateurs industriels européens ont, en priorité, une fabuleuse carte à jouer !

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Cet article vous est fourni en cooperation avec le blog Euro-Loyalty que vous pouvez retrouver ici.