Aeroplans - Su T-50 PAK FAAprès le vol inaugural du premier prototype T-50 du Sukhoï PAK FA, le « Fifth Generation Fighter Aircraft » (FGFA) russe commence une longue carrière dans une bataille médiatique, politique, militaire et économique qui l’opposera au F-22 Raptor.

Le chasseur-bombardier furtif américain domine pour l’instant ce marché qui n’en est d’ailleurs pas vraiment un. Interdit à l’exportation en dehors des Etats-Unis, l’appareil sera peut-être décliné dans une version export avant l’arrêt de sa production en 2011. En attendant, Sukhoï compte bien être un concurrent digne de ce nom. Compte tenu de son développement déjà partagé avec l’Inde, le PAK FA est résolument tourné vers la conquête de nouveaux marchés pour redonner ses lettres de noblesse à l’industrie aéronautique russe.

 

 

Un appareil pour conquérir le monde.Aeroplans - sukhoi_t-50_pak_fa_and_the_chase_plane_su-27_ub

Si l’Inde se portera acquéreuse de 250 avions qui seront rebaptisés pour l’occasion FGFA, le marché est largement porteur aux yeux de Moscou. "Pour ce qui est des appareils de ce type, il y a un marché pour plus de mille exemplaires", a dit Mikhaïl Pogosian, directeur du constructeur Sukhoï. Ainsi, la Russie devrait produire plus de mille chasseurs furtifs dans les prochaines quarante années. Des appareils destinés à leur propre armée, à celle de l’Inde mais aussi à de nouveaux marchés export. Le PAK FA sera alors la seule alternative au F-22 Raptor et donc sur une offre américaine. Ceci si l’avion de Lockheed Martin est dérivé dans une version à cet effet. Cependant, le Raptor a été développé il y une dizaine d’années alors que le PAK FA devrait rentrer en service opérationnel d’ici cinq ans. D’aucun critiquent le manque de maitrise de l’industrie russe qui renait petit à petit de ses cendres. Et pourtant, on connait la détermination de Moscou, et le PAK FA semble être un appareil en phase d’aboutissement. Malheureusement, on n’a pas encore beaucoup de détails Aeroplans -  sukhoi_t-50_pak_fa_and_the_chase_plane_su-27_ub_2sur les performances de l’avion.

L’Asie en ligne de mire.

Si l’appareil aura déjà fort à faire avec ces deux armées, le PAK FA a de fortes ambitions à l’export et ce, notamment en Asie. Pour cet article, nous nous concentrerons sur deux pays pourtant sous influence américaine, le Japon et la Corée du sud. En effet, ces deux exemples sont intéressants puisque l’attitude de Washington leur a profondément déplu ces derniers temps. Et ce, surtout sur les dossiers F-22 et F-35. Ainsi, le Japon n’a pas du tout apprécié que les Etats-Unis n’acceptent pas de vendre des exemplaires du chasseur furtif. Alors que le pays se sentait l’un des grands alliés des Américains, notamment en tant que tête de pont pour une stratégie de contre-influence face à la montée en puissance chinoise, Tokyo fulmine.

 

Aeroplans - F-22 RaptorLes Japonais envisageraient le PAK FA mais en profitent également pour faire pression sur le F-22.

Pour Washington qui semble sous-estimer l’esprit japonais, le refus d’une telle exportation aura des conséquences. Ceci même si une version export est à l’ordre du jour au Pentagone. Forts de cette situation tendue entre Tokyo et Washington, Moscou sera à l’affut d’un coup médiatique hors-norme. Ainsi, puisque seulement deux offres s’affronteraient sur le marché les Japonais envisageraient de s’équiper du FGFA russe.

D'autant plus que le PAK FA est moins cher puisque le coût unitaire devrait avoisiner les 70 millions d’euros tandis que le F-22 ressortirait autour des 180 millions de dollars. Il s'agit là de prix dans leurs versions actuelles et non de celles qui seront proposées à l'export. Le PAK FA se positionne même mieux que le F-35 Lightning II qui coûterait autour de 80 millions d’euros si le coût unitaire Aeroplans - Su T-50 PAK FA et F-22 Raptorne dérape pas trop encore. Or, en dehors de son prix attractif surtout en période de crise, les Japonais ont officiellement formulé une préférence pour un chasseur bombardier furtif de ce type plutôt que d’un appareil comme le F-35 pour répondre à leurs menaces.

Le F-22 Raptor présente lui aussi des avantages en termes de coûts puisque le personnel nécessaire à sa préparation est réduit de moitié par rapport à celui nécessaire pour un F-15 Eagle. De fait, l’appareil peut voler deux fois plus longtemps que son prédécesseur avant toute période de maintenance. Enfin, il peut être prêt au combat en un tiers du temps autrefois nécessaire pour le F-15. Mais nul doute que Sukhoï travaille sur ces mêmes problématiques, mais une quinzaine d’années plus tard.

Le fidèle allié sud-coréen intéressé par l’offre russe.

Selon les médias sud-coréens, le pays serait lui aussi potentiellement intéressé par un achat de PAK FA russes. Un tel choix, s’il avait lieu, serait une énorme surprise pour la Corée du Sud pourtant largement encline à acheter du matériel américain. A regarder leur flotte d’avions de combat, il n’y a pas de doutes : 60 F-15E StrikeAeroplans - F-15 Eagle Eagle (encore en cours de livraison), 180 F-16C/D fabriqués sous licence par KAI, 147 F-4 Phantom II et bien-sûr 174 F-5E Tiger II qui seront bientôt remplacés par des FA-50. Cependant, l’achat de F-35K pourrait très bien être repensé en fonction de cette nouvelle donnée qu’est le PAK FA.

Pour les médias coréens il n’y en tout cas pas de doute pour que la version export du PAK FA soit proposée à Séoul. Selon eux, les Russes seraient d’ailleurs en train de gagner du terrain en tentant de vendre des Su-35 et MiG-35. La Russie qui possède une dette autour de 7 milliards de dollars vis-à-vis de la Corée du Sud pourrait profiter de transferts de technologies et de la vente de ses appareils pour combler sa facture. Mais attention, on se souviendra de l’échec de la vente de Rafale en Corée du Sud au profit du F-15 pour remettre l’influence américaine en place à Séoul. Ceci alors que les transferts de technologies français étaient bien plus importants que ceux proposés par Washington.

 

Et pour le reste du monde.

Sukhoï, qui tout comme Lockheed Martin n’exportera pas son Aeroplans - Su T-50 PAK FAappareil en version complète pourrait également intéresser d’autres pays à travers le monde. Souvent, ce seraient de proches alliés de Washington eux aussi désabusés par l’attitude américaine sur le dossier F-22. Parmi eux, l’Australie s’inquiète de voir sa domination aérienne se réduire après 2010. C’est cela qui a poussé la RAAF à envisager l’achat de F-22 Raptor. Des efforts restés sans réponse positive face au protectionnisme américain et surtout au manque de version exportable du chasseur. L’Australie, qui participe aussi au programme JSF (F-35) ne veut pas perdre du terrain en Asie du Sud-est alors que d’autres puissances se dotent de technologies des plus récentes. Ainsi, si la situation ne se débloquait pas aux États-Unis, Canberra pourrait très bien se rapprocher de Moscou et de son PAK FA.

En attendant tout marché export, le FGFA russe devra encore parcourir un bon bout de chemin. Mener à bien sa campagne de mise en service opérationnel reste sa priorité d’autant plus que le programme est ambitieux. Mais Moscou met les moyens pour conquérir ce marché en attendant une très probable réaction américaine qui ne souffrira pas de laisser le champ libre aux Russes. Nous devrions y voir plus clair avant 2011, date de l’arrêt de la production du F-22 pour les besoins de l’Air Force.

Michael Colaone.