Aeroplans - Décollage réussi pour la cinquantième Ariane 5 © ArianespaceLa nuit dernière, à 00h01 heure de Paris, le lanceur L551 a été lancé avec succès du Centre Spatial Guyanais. Il emportait les satellites de télécommunications ASTRA 3B, pour le compte de la SES, et COMSATBw-2, pour le Ministère allemand de la Défense.

Un peu plus de 33 minutes après le décollage, les deux satellites étaient correctement injectés sur leur orbite de transfert géostationnaire, marquant ainsi le trente-sixième succès d’affilée pour le lanceur européen.

Toutefois, ce n'est qu'une bataille de gagnée dans la guerre que se livrent Arianespace et ILS dans le transport spatial. Le concurrent russe a en effet réalisé pas moins de cinq lancements de Proton en 2010, dont trois commerciaux (satellites Intelsat-16, EchoStar XIV et SES-1).

Il faudra encore beaucoup d'efforts à l'opérateur européen pour rattraper ce retard, et il semble maintenant évident que les sept lancements annoncés d'Ariane 5 d'ici fin décembre ne pourront pas être réalisés, surtout avec un ATV dans le lot.

Mais hier soir, à Kourou, l'heure n'était pas aux lamentations, mais bel et bien à la fête. Les contre-temps qu'a connu le Vol 194 ne doivent pas faire oublier que l'Europe, grâce à Ariane 5, reste le leader mondial dans son domaine.

 

 

 

 

Aeroplans - Explosion du Vol88

La réussite n’a pourtant pas toujours été au rendez-vous. Avec un développement lancé en 1986, tout le monde au CSG se souvient du tragique accident de 1995 où deux techniciens avaient trouvé la mort par asphyxie lors des essais au sol du premier lanceur.

Premier lanceur qui explosera moins de quarante secondes après son décollage, le 4 juin 1996 (Vol 88). De graves défauts de conception étaient à l’origine de cette catastrophe. Le programme de navigation ayant été recopié sur celui d’Ariane 4, il ne comportait tout simplement pas assez d’espace mémoire pour stocker la valeur de l’accélération, plus importante chez Ariane 5 que chez son aînée.

Ainsi, l’ordinateur de bord avait reçu des données d’accélération complètement erronées. Essayez de cacher le dernier chiffre de votre réveil à affichage numérique, et vous verrez que vous n’arriverez as à l’heure au travail lundi matin !

Le lanceur calcule sa position en fonction de l’accélération. Si la mesure de celle-ci est erronée, l’ordinateur ne sait plus où il se trouve. Ainsi, alors qu’elle avait à peine quitté l’Ensemble de Lancement n°3, la première Ariane 5 croyait qu’elle survolait tantôt le Pérou, tantôt le Pôle Nord. Essayant de retrouver sa route, elle avait braqué brusquement les tuyères de ses moteurs, ce qui l’avait fait virer avec une violence époustouflante, allant jusqu’à briser la coque au niveau de la coiffe.

Détectant une perte d’intégrité, l’ordinateur avait alors commandé l’autodestruction, confirmée quelques instants plus tard par la Sauvegarde Vol. Sept-cents tonnes de débris incandescents déferlaient alors sur les plages guyanaises.

Un an plus tard, le second vol (Vol 101) ranimait les espoirs en s’élevant fièrement dans un ciel bleu cyan. Tous les mauvais souvenirs de la mission inaugurale semblaient effacés, mais ils resurgirent rapidement. Car même si, visuellement, tout s’était bien passé, le lanceur était en fait entré en rotation, ce qui avait entraîné une surconsommation, et les satellites avaient été placés sur une orbite bien trop basse.

Aeroplans - Vol  142Le troisième vol, en octobre 1998, sera quant à lui un succès complet (Vol 112). Il faudra cependant attendre plus d’un an avant de voir le premier vol commercial, qui a lieu en décembre 1999 avec le satellite XMM-Newton de l’ESA (Vol 119).

Mais dès l’été 2001, une nouvelle anomalie apparaît lors du Vol 142, et l’orbite atteinte est incorrecte. Ce revers n’est rien, cependant, en comparaison de ce qui frappe Arianespace le 11 décembre 2002.

Ce jour là, la première Ariane 5 ECA (Vol 157), véritable cheval de bataille porteur de tous les espoirs du spatial européen, explose en plein vol avant même l’allumage du nouvel étage supérieur ESC-A. C’est un Jean-Yves Le Gall au bord des larmes qui annonce la mise sur pieds d’une commission d‘enquête, qui arrivera à la conclusion qu’une erreur de conception est à l’origine de l’échec.

Il faudra plus de deux ans aux ingénieurs de la Snecma et d’EADS pour corriger le problème, et finalement c’est le mois de février 2005 qui marque le retour en vol de la version ECA (Vol 164).

En revanche, depuis l’échec de décembre 2002, jamais un lanceur Ariane 5 n’a failli à sa mission, ne serait-ce que partiellement. Félicitations à toutes les équipes impliquées dans cet immense succès technique, politique et commercial, qui fait la fierté de l’Europe et de la France !

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Aeroplans - Ariane 5 Vol 194 sur zone de lancement © ArianespaceAeroplans - Astrium delivers Astra 3B satellite to launch site © EADS Astrium / 2010Aeroplans - COMSATBw-2 © Arianespace/ESA