Aeroplans - Famille A320Au fil des mois, la pression monte autour de l’évolution inévitable des deux « best-sellers » européen et américain. Véritables poules aux œufs d’or pour les deux plus grands avionneurs mondiaux, l’A320 et le B737 vont devoir se moderniser car en face, la concurrence commence à s’organiser et va bientôt attaquer ce duo-pôle historique.

Bombardier CSeries, C919 chinois ou hypothétique Embraer 195X, tous vont bientôt débouler sur le marché mondial avec leurs atouts et leurs faiblesses. Si l’A320 a maintenant été lancé en 1988 et le B737 vingt ans plus tôt, ces deux pontes de l’aviation commerciale vont devoir évoluer pour continuer à assurer à Boeing et EADS des assises confortables.

 

 

Le 11 février, Air China commande vingt A320 supplémentaires livrables entre 2011 et 2014 et à un prix catalogue de 1,18Md€ pièce. Six jours plus tôt, c’est la Turkish Airlines qui commandait trente-cinq B737, dont quinze options. Et les commandes continuent au fil des ans, assurant ainsi des rentrées d’argent pour les deux principaux constructeurs d’avions civils mondiaux. Assurant ainsi la pérennité des activités des entreprises concernées, ces deux programmes sont cruciaux pour Airbus comme pour Boeing. Autant dire alors que la rénovation de ces appareils est un sujet critique et sur lesquels ils devront porter beaucoup d’attention.

La remotorisation, en attendant mieuxAeroplans - B737

Airbus pourrait annoncer sa décision de remotoriser l'A320 lors du salon aéronautique de Farnborough, en juillet prochain, a indiqué hier son directeur commercial, John Leahy, lors d'une conférence de presse tenue sur le salon de Singapour. Même son de cloche chez Boeing durant la présentation de son bilan annuel. La remotorisation du B737 serait sérieusement envisagée par la firme de Seattle.

Puisque la pression des compagnies pour une amélioration des modèles actuels est constante, Airbus et Boeing ont toujours fait évoluer leurs modèles. On se souvient principalement de l’apparition des «winglets» qui permettent une très bonne diminution de la consommation de kérosène. Mais voila, depuis 25 ans pour l’A320 et 45 ans pour le B737 les technologies ont très largement évoluées et c’est d’un lifting drastique dont il est question.

Aeroplans - Leap-X

Ainsi, la remotorisation serait une solution temporaire en ces temps de difficultés budgétaires. Alors que les esprits sont tournés vers l’A350 et le B787, cette solution permet de gagner du temps tout en satisfaisant la demande.

Ainsi, chez Airbus on pourrait continuer à proposer deux motorisations différentes et en option en plus des CFM56 ou V2500 actuels. Les clients auraient ainsi le choix entre le Leap-X de CFM International (Safran-GE) et une variante du PW1000G PurePower du consortium américano-britannico-allemand IAE (Pratt & Whitney-Rolls Royce-MTU). Avec une mise en service qui pourrait avoir lieu en 2015, ces deux motorisations sont des plus modernes. Le Leap-X a choisi de recourir massivement à l’utilisation de matériaux composites allégeant ainsi considérablement son poids. Il devrait diminuer de 16% la consommation de carburant et de 60% des émissions de NOx. Quand au PW1000G, sa nouveauté réside en son système d’engrenages. Ce dernier améliore le rendement de toutes les parties du réacteur.

Aeroplans - pw1000gChez Boeing, la solution la plus probable serait l’utilisation des futurs réacteurs produits par CFM International, motoriste exclusif du 737 depuis son introduction. A Seattle on se concentre sur les améliorations aérodynamiques du B737 qui en est tout de même à sa troisième génération d’avions. Alors que la nouvelle génération de B737 serait déjà sur les planches à dessins, cette remotorisation pourrait se heurter à deux problèmes majeurs. D’une part, ces nouveaux moteurs disposent d’une soufflante plus importante, ce qui pourrait poser un problème de garde au sol. Enfin, une remotorisation équivaudrait à entre 20% et 30% du prix de l’appareil. Malgré le succès commercial de ces avions, ces investissements ne seraient-ils pas une perte de temps et surtout d’argent ?

 

 

Marcher sur des œufs en attendant la concurrenceAeroplans - Bombardier CSeries

D’un certain point de vue, la révolution des A320 et B737 ne souffre que des autres projets en cours : A350, B787, B747 ou A380. Mais attention, d’un point de vue commercial aussi une nouvelle génération de ces appareils est périlleuse. Si l’avionneur européen et son concurrent américain n’envisagent pas de lancer de tels modèles avant 2020 (on parlé avant cela de 2015), c’est aussi pour éviter une perte des commandes. Alors que les cadences de productions n’ont pas été revues à la baisse, les clients risqueraient, en cas d’annonce d’un successeur, de préférer attendre ce dernier plutôt que d’acheter le modèle actuel, à moins d’un besoin urgent.

Cependant, Airbus et Boeing savent qu’il faudra lancer un nouveau modèle ou au moins une version amplement modernisée pour contrer cette nouvelle concurrence qui arrive. De nouveaux acteurs, que sont les C919 de la Comac chinoise, les CSéries de Bombardier et Aeroplans - C919peut-être même le projet du Brésilien Embraer 195X. Une concurrence qui, elle aussi, a bien pris en compte les évolutions technologiques de ces vingt-cinq dernières années. Si l’on revient sur les motorisations qui seront proposée par ces nouveaux-entrants, les faits ne sont pas rassurants.

Snecma et GE ont en effet raflé le contrat unique des C919 et fournira des Leap-X à la Comac. Quand au PW1000G, il équipera les CSeries canadiens. Ces mêmes moteurs qui sont affichés comme une révolution chez Airbus et Boeing ne seront finalement qu’une mise à niveau face à la concurrence. Autrement dit, si les deux avionneurs souhaitent continuer à dominer le marché de part leur supériorité technologique ils sont condamnés à lancer une nouvelle gamme d’A320 et de B737.

Aeroplans - A320 et winglets

Vers une version bi-couloir de ces appareils ?

Enfin, selon des informations révélées par La Tribune l’an dernier, Airbus réfléchirait à donner non pas un, mais deux successeurs à son A320. Si nous n’avons pas trouvé d’information similaire chez Boeing, il va de soi que cela est surement à l’étude. Fort de son expérience dans les fuselages larges, Airbus mettrait alors en service un appareil inédit. Cette réflexion répondrait alors aux demandes de certaines grandes compagnies aériennes ainsi que de low costs, désireuses de mieux rentabiliser l’exploitation des avions.

Mais voila, le projet se heurte à l’éternelle rivalité franco-allemande au sein d’EADS. Si la répartition de la charge industrielle au sien du consortium va être favorable à Paris pour le programme A350 actuellement en cours de mise en route, Berlin voudrait que le futur A320 soit produit en Allemagne. Cette négociation pourrait cependant s’avérer plus simple que les autres. Avec les Aeroplans - A350difficultés rencontrées par le B787, Toulouse, où seront produits les futurs long-courriers A350, se frotte les mains. De plus, une version bi-couloir serait elle-aussi probablement construite en France puisque l’expertise du groupe dans les fuselages larges se situe aussi à Toulouse. Berlin récupérerait ainsi la production des futurs monocouloirs et l’équilibre serait peut-être acceptable.

Interrogé sur l’inconvénient financier de lancer deux avions au lieu d’un par La Tribune, Jacques Delys, du cabinet spécialise ID Aero évoque une hypothèse : celle d’une remotorisation de l’A320 actuel d’une part et pour le modèle bi-couloir, d’une réutilisation de l’A350 avec une aile plus petite : « au total, cela ne serait pas plus cher que le coût d’un seul programme entièrement nouveau ».

Michael Colaone.